Qui est-ce qui cause la plus grande partie des maux de la terre, si ce n'est le contact incessant des hommes méchants et pervers ? L'égoïsme tue la bienveillance, la condescendance, l'indulgence, le dévouement, l'affection désintéressée, et toutes les qualités qui font le charme et la sécurité des rapports sociaux. Dans une société d'égoïstes, il n'y a de sûreté pour personne, parce que chacun, ne cherchant que son intérêt, sacrifie sans scrupule celui de son voisin. Beaucoup de gens se croient parfaitement honnêtes parce qu'ils sont incapables d'assassiner et de voler sur les grands chemins ; mais est-ce que celui qui, par sa cupidité et sa dureté cause la ruine d'un individu et le pousse au suicide, qui réduit toute une famille à la misère, au désespoir, n'est pas pire qu'un assassin et un voleur ? Il assassine à petit feu, et parce que la loi ne le condamne pas, que ses pareils applaudissent à son savoir faire et à son habileté, il se croit exempt de reproches et marche tête levée ! Aussi les hommes sont-ils constamment en défiance les uns contre les autres ; leur vie est une anxiété perpétuelle ; s'ils ne craignent ni le fer, ni le poison, ils sont en butte aux chicanes, à l'envie, à la jalousie, à la calomnie, en un mot à l'assassinat moral. Que faudrait-il pour faire cesser cet état de choses ? Pratiquer la charité ; tout est là, comme dit Lamennais.
Allan Kardec, Revue Spirite, juillet 1865.
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